Risque client : Comment arbitrer, décider et fixer une limite de crédit ?
Fiche pratique – 30/07/2020
Après avoir analysé la santé financière, juridique, judiciaire ainsi que le profil « payeur » de votre client, vous avez tous les éléments pour déterminer le profil « risque client » et ainsi fixer une limite de crédit.
1. Comment établir un « scoring » du risque client ?
La solidité du client et sa capacité à honorer ses factures dans les délais doivent être synthétisées par un score ou profil global de risque client. Le profil de risque client représente la probabilité pour une entreprise de déposer son bilan. Chaque profil doit être quantifiable, par exemple :
- Risque client minimum : score 1
- Risque client faible : score 2
- Risque client moyen : score 3
- Risque client fort : score 4
- Risque client maximum : score 5
La détermination de ce profil de risque client peut-être effectuée en interne par le crédit manager ou bien externalisée auprès d’un spécialiste de l’information financière et commerciale. Réaliser une étude de solvabilité entreprise complète est extrêmement chronophage et n’est pas adaptée à l’analyse d’un grand portefeuille de clients. Le crédit manager pourra confier ce type de mission à un analyste crédit en interne, à condition d’avoir ciblé au préalable quelques clients sur lesquels il estimera nécessaire d’approfondir l’analyse du risque. De fait, comment évaluer rapidement, « en un clic », le risque d’une grande population de clients ? En faisant appel à des modèles fondés sur des techniques statistiques.
Plusieurs modèles ont pour ambition d’évaluer la probabilité de faillite, les plus connus sont les suivants :
→ Le score de Conan et Holder, modèle conseillé pour les entreprises industrielles réalisant un chiffre d’affaires de 1,5 à 75 M€. Il aboutit à un classement des sociétés des plus risquées (score inférieur à 6,8) aux plus saines (score supérieur à 16,4)
→ Le score sectoriel AFDCC, modèle conseillé pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaires de 150 000 à 75 M€. Il comprend 11 fonctions pour 7 secteurs d’activité en différenciant les TPE des PME.
→ Le score Banque de France, dont la nouvelle formule est tenue secrète, est axée plus particulièrement sur l’endettement financier (importance, structure et coût de l’endettement).
Si la vente est conclue, il convient alors de fixer une limite de crédit afin de limiter votre engagement et votre exposition au risque d’impayé.
2. Comment fixer une limite de crédit ?
La limite de crédit peut se définir comme l’encours client maximum à ne pas dépasser pour chaque client. Elle correspond au risque client maximum que la société a accepté de prendre. La fixation d’une limite de crédit est la décision la plus difficile à prendre dans la gestion du crédit client car elle a un impact direct sur le niveau du chiffre d’affaires réalisé avec un client et sur le risque financier que ce client fait courir à l’entreprise. Le calcul de la limite de crédit n’est pas une science exacte et chaque crédit manager développe sa propre méthode.
Nous évoquerons ici des méthodes basées sur l’analyse du patrimoine de l’entreprise (Bilan) et des méthodes basées sur l’analyse de l’exploitation (Compte de Résultat).
2.1. Evaluer le risque client : méthodes basées sur l’analyse du patrimoine de l’entreprise (Bilan)
→ Les données issues du haut de bilan les plus utilisées pour fixer une limite de crédit sont les capitaux propres, la situation nette comptable et le fonds de roulement. Le calcul de la limite de crédit se fait en appliquant un pourcentage au solde bilantiel choisi. Plus le risque client sera important, plus le pourcentage sera faible.
Par exemple : Capitaux propres = 250 K€
→ La donnée issue du bas de bilan la plus utilisée est le poste fournisseur. En calculant le ratio « encours client/dettes fournisseurs », on évalue la part que l’on occupe dans le total de l’encours fournisseurs du client. La limite de crédit peut alors être déterminée comme le pourcentage au-delà duquel le vendeur ne veut pas s’engager.
Par exemple, en franchissant la barre des 25% des dettes fournisseurs, le vendeur risque de passer de la position de simple créancier à celle de principal bailleur de fonds, surtout s’il a investi plus que les actionnaires ou les banques de son client. Devenant fournisseur principal, il risque de rendre son client dépendant de l’encours client qu’il lui accorde si ce dernier finance son exploitation par le crédit inter-entreprises. Alors, tel un actionnaire qui est contraint d’effectuer une augmentation de capital pour assurer la survie de son entreprise, le fournisseur peut être contraint d’accorder des conditions de paiement avantageuses pour éviter à son client d’être en cessation de paiements.
INFORMATIONS CLÉS
- Un score global de risque synthétise la solidité de son partenaire et sa capacité à honorer ses factures dans les délais.
- Les méthodes les plus utilisées pour fixer une limite de crédit sont basées sur l’analyse du patrimoine de l’entreprise (Bilan) ou sur l’analyse de l’exploitation (Compte de Résultat).
2.2. Evaluer le risque client : méthodes utilisant des données du compte de résultat
Travailler sur le compte de résultat présente l’avantage d’avoir une image de l’ensemble de l’exercice passé et de travailler sur des flux. Le principe de calcul de la limite de crédit est le même que pour le Bilan : on choisit judicieusement un poste du Compte de Résultat et on détermine, pour chaque classe de risque client, quel pourcentage permet d’évaluer le plus justement une limite de crédit.
On peut utiliser le chiffre d’affaires (donnée la plus facilement disponible) ou certains Soldes Intermédiaires de Gestion. On peut se servir de la marge brute, de la valeur ajoutée, de l’EBE, du Résultat d’exploitation, du RCAI ou du Résultat net.
La limite de crédit est alors un pourcentage de l’indicateur choisi, pourcentage qui varie en fonction du risque client estimé.
→ Exemple n°1 : un fournisseur note ses clients de 1 à 20 suite à une évaluation de leur risque de défaillance. Il choisit l’EBE comme indicateur de référence et y applique un pourcentage pour déterminer la limite de crédit :
→ Exemple n°2 : le chiffre d’affaires que le fournisseur réalise est enregistré dans le poste «Achats» ou « autres achats et charges externes » du client. Ce poste relate bien la politique d’approvisionnement du client sur l’ensemble de l’exercice contrairement au poste « dettes fournisseurs » qui peut être biaisé à la clôture de l’exercice. Vous pouvez fixer une limite de crédit en procédant de la façon suivante : par exemple, votre client a réalisé 1 M€ d’achats sur l’année, vous estimez, après une analyse du risque, qu’il convient de ne pas dépasser 40% des achats de ce client. Les conditions de règlement avec ce client sont à 60 jours.
La limite de crédit est égale à 40% x 1 M€ x 60 / 365 = 66 K€
En conclusion, notons que beaucoup de crédit managers n’utilisent aucune de ces méthodes, mais ils s’en inspirent plus ou moins pour élaborer leur propre recette, souvent liée à leur secteur d’activité et à leur expérience. Le plus important est de bien tester la méthode retenue sur sa population de clients et de l’affiner à chaque cas de défaillance d’un client.
Adapter la politique crédit et maîtriser le risque client
Réaliser une étude de solvabilité entreprise des clients et fournisseurs de votre société vous permet d’en évaluer la pérennité et la fiabilité, de définir une limite de crédit ou d’acompte et de sécuriser le risque client.